Hommage au professeur Bernard Descottes
Quel culot ! Partir comme ça sans prévenir. Lui qui avait consacré sa vie à soigner les autres...
J'ai mis du temps à me rendre compte de l'incroyable histoire que je venais de vivre. Mais aussi l'incroyable drame. Comment trouver les mots justes, tellement cette histoire semble tout droit tirée d'un roman ou d'un mauvais rêve ?
Il y a un an jour pour jour j'étais revenu miraculé de l'Everest, j'étais ensuite amputé de tous mes orteils au pied droit, puis cicatrisé par le miel. Six mois après je revenais avec le vélo à la compétition et, aujourd'hui, Bernard Descotte disparaît.
Non, vraiment cette histoire est incroyable et elle ne doit pas s'arrêter là. Je lui dois bien ça !
À Bernard...

Je n'avais jamais rencontré Bernard Descottes. Je l’avais juste eu au téléphone, longuement, plusieurs fois… je lui parlais de moi, de ma santé, de mes orteils mais sans jamais qu'il ne me parle du mal dont il était atteint.
On parlait du miel, de l'apiculture, des solutions à mettre en place en Afrique, à Madagascar. On parlait même de la réforme de la sécurité sociale. Il y aurait tellement à faire. On parlait de son travail au CHU, de la qualité des soins. Par dessus tout il aimait les gens, il aimait ses patients.
Lorsque ce jour du 11 novembre 2008, un chirurgien m'ôta tous les orteils au pied droit et donc par la même mettait fin à 20 ans d’athlétisme, à 20 ans de ma vie. Il m’enleva ce jour-là tout mes espoirs de pouvoir recourir un jour et ce fut de loin le jour le plus noir. Un semaine plus tard, une autre chirurgienne voulait me ré-amputer pour pouvoir ainsi refermer le moignon, genre saucisson qu'on coupe. Je vous en enlève combien ? C'est pour votre bien !
C'est alors que j'ai appelé Bernard Descottes. Il m’a convaincu du contraire. Il me parla du miel et de l’extraordinaire potentiel du corps humain pour se reconstruire. Il m’a redonné pour la première fois depuis le drame un peu d’espoir. Je décidais donc d’appliquer sa méthode : du miel de thym sur la plaie laissée béante. Et ça marchait (si je puis dire !).
C’était incroyable. Pour appliquer ce miel sur mon pied, j’avais dû quitter l’hôpital. J’étais, avec mes infirmières, un hors la loi pour la médecine. Pourtant en moins de deux mois j'avais cicatrisé et je remarchais, en moins de trois je remontais sur un vélo et en juillet dernier, 7 mois après le début du traitement, je participais à « L’étape du Tour » une course de vélo de 167 km avec dans l’ascension finale, le mont Ventoux !
Puis le tourbillon de la vie a repris son cours, avec son stresse, ses « impératifs ». Mais sans jamais pouvoir dire à Bernard Descottes combien il m'avait sauver la mise.
Bernard Descottes n’a pas trouvé la solution pour vaincre son cancer, sans doute était-il trop occupé à soigner les autres.
Mais il nous laisse un merveilleux héritage. Il nous dit que la nature peut nous venir en aide. Que rien n'est définitif, qu'il faut rester à l'écoute de son corps, lui laisser le temps de trouver ses propres solutions, ses propres remèdes et que la nature a pensé à tout. Les abeilles en sont un formidable exemple. Quelques pots de miel suffiraient à soigner tout un village d'Afrique. C’est un comble ! Alors qu’elles sont menacées de disparaître, on redécouvre seulement maintenant le pouvoir antiseptique du miel.
En conclusion, tout va trop vite, on s'empresse d'ampûter les gens, on infantilise les patients, on ne tient pas compte de leur personnalité et on gère non plus des hommes, mais des cas.
Certains pensent pouvoir comprendre après 14 ans études "seulement" le fonctionnement d'une machine qui a mis 7 millions d'années pour être au point !!!
À cette question que j'avais posé à l'amputeur pressé ; est-ce qu'un membre (ici les orteils) peut être revascularisé, la réponse fut indubitablement NON ! Un membre, quand il n'est plus vascularisé est mort.
Bernard Descottes m'avait confié que le miel pouvait, dans certains cas, aider à la revascularisation. Doux rêveur ? peut-être,... ou pas. J'ai rencontré depuis, plusieurs chirurgiens vasculaires qui pensent aussi la même chose.
Comme dirait mon pied gauche lui aussi nécrosé mais pas amputé, et qui a parfaitement récupéré. Je n'ai qu'un seul regret Monsieur Descottes, celui de ne pas vous avoir rencontré quelques jours plus tôt...